Un cadeau pour les actionnaires plutôt que pour l’emploi

L’invité David Payot, candidat popiste à la Municipalité de Lausanne, explique dans le détail pourquoi il faut s’opposer à la RIE3.

 La troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE3) fait valser les chiffres. L’un d’eux peut surprendre: le Conseil d’Etat propose de baisser les impôts de toutes les entreprises, pour éviter le départ de sociétés à statuts spéciaux. Ces sociétés rapportent actuellement 371 millions d’impôts au canton; la baisse fiscale nous coûterait 390 millions, sans compter quelques centaines de millions de pertes qui se discutent à Berne. Au final, pourquoi une réforme qui coûte plus cher que ce que ces entreprises rapportent?

La réponse officielle est: pour sauver des emplois. Est-ce en baissant l’impôt sur le bénéfice que l’on favorise l’emploi? Une entreprise n’embauche pas des employés parce qu’elle fait des bénéfices. Elle engage lorsque des travailleurs supplémentaires permettent de réaliser des bénéfices supplémentaires.

L’impôt qui touche ensuite ces bénéfices n’influence pas directement l’emploi. Les trois quarts des entreprises vaudoises ne paient pas d’impôts sur les bénéfices, soit parce qu’elles n’y sont pas assujetties, soit parce qu’elles ne réalisent pas de bénéfices. Cela ne les empêche pas de générer des emplois, heureusement!

Les baisses d’impôts, selon certains, devraient permettre d’attirer des entreprises en se montrant plus compétitif que les cantons et pays voisins. Vraiment? Les six plus grandes villes de Suisse se concentrent parmi les sept cantons où la fiscalité des entreprises est la plus chère. Ces six villes rassemblent 13,5% de la population, mais 18,5% des entreprises et 25% des emplois. Cette attractivité, nous ne la devons pas à une fiscalité basse, mais aux atouts que peuvent proposer les villes – et entre autres, différents services publics: des moyens de transport efficaces, des institutions de formation, des solutions d’accueil de jour pour les enfants.

Baisser la fiscalité des entreprises, c’est donc se priver de ressources, qui manqueront pour financer ces infrastructures. Lausanne est bien sûr concernée par ces chiffres: elle figure en 5e position des villes suisses du point de vue de la population comme des entreprises et des emplois. Si l’imposition des entreprises baisse, ce sera une diminution des ressources, communales et cantonales, qui font actuellement la richesse de l’offre lausannoise. Combien d’emplois seraient ainsi perdus, dans la fonction publique ou dans les entreprises qui bénéficient de leur action? Le Conseil d’Etat ne publie pas ces chiffres.

Les baisses fiscales de la RIE3 profiteront assurément aux actionnaires, mais pas forcément à l’emploi et aux salariés. Au contraire, ceux-ci risquent de payer les cadeaux octroyés. C’est pour cette raison que je m’opposerai à la RIE3 le 20 mars prochain, et appelle les Lausannois-es à le faire.