Par Christiane Jaquet-Berger, députée au Grand Conseil vaudois, pour le groupe La Gauche (POP-Solidarités)

Prise de position sur la feuille de route du Conseil d’Etat concernant la fiscalité des entreprises

Le Groupe POP solidaritéS s’oppose à la feuille de route, telle qu’elle nous est présentée aujourd’hui par le Conseil d’Etat. Car si nous voulons plus d’équité pour les entreprises d’ici et pour les familles, nous ne voulons pas plus de sous enchère fiscale intercantonale.

N’en doutez pas, nous nous réjouissons certes d’une proposition qui corrige quelque peu la sous enchère fiscale dans le domaine des entreprises étrangères qui réalisent l’essentiel de leur chiffre d’affaire au delà de nos frontières, un système helvétique quasiment sans concurrence au niveau international.

Or, ce système si accueillant et si généreux prive d’autres pays, dont des pays dits émergeants, de plusieurs milliards d’impôts par an.
Donc tant mieux si l’on décide d’aligner les impôts de ces entreprises sur ceux des entreprises locales et régionales. C’est déjà ça.

Les pressions de l’OCDE et de l’ UE sont enfin prises en compte et vont permettre de mettre fin à une situation injuste et inique, ainsi qu’à l’image de notre pays – comme le relève d’ailleurs le rapport de la COFIN – .

Mais la situation est plus tordue que cela.

Car le Conseil d’Etat et la Confédération veulent bien – ils y sont bien contraints – calmer le jeu du côté international et face à l’OCDE et à l’UE, mais en même temps le canton n’hésite pas à vouloir instaurer un dumping fiscal entre les cantons… Une attitude vraiment schizophrène !

Faire passer les impôts des entreprises de 22% à 13,8% n’est tout simplement pas acceptable. Il est normal que les entreprises participent
pleinement au financement de l’Etat, les entreprises et pas seulement les impôts des personnes qu’elles emploient.

Les diminutions fiscales importantes prévues, quelque 400 millions par an pour le canton, sont démesurées, sans parler des risques importants qu’elles induisent – que l’on songe seulement à l’application du menaçant art164 de notre Constitution – même si notre situation financière est très favorable, particulièrement l’année 2013.

Mais l’habile « aguillage » – comme on dit chez nous – aguillage improbable, allant d’une éventuelle et mystérieuse redistribution par la Confédération à une augmentation des allocations familiales et à la participation au financement de l’accueil de jour des enfants – deux excellentes propositions certes, ne sont que de gentils hochets. Que dire aussi du manque de négociations avec les communes et de quelques promesses destinées à les rendre joyeuses ? Le chef du département des finances, pourtant toujours si prompt à mettre en exergue les menaces sur les finances, joue de son registre préféré d’équilibriste pour défendre, avec le président du Conseil d’Etat, un « pacte de responsabilité » dont ils se targuent pour l’avenir, sans la moindre garantie.

Comment faire confiance alors qu’aujourd’hui on constate, après les promesses et les mensonges fédéraux, le résultat de la 2ème
fédérale de la fiscalité des entreprises ? Mille milliards de redistribution aux actionnaires nets d’impôts, alors qu’on promettait à peine 50 millions de redistribution ?

La course au dumping fiscal pour les entreprises est-elle réellement un objectif prioritaire du Conseil d’Etat, est ce une fatalité inéluctable et
surtout devrions nous en faire les frais ? Si le splendide jeu virtuel du Conseil d’Etat s’écroule comme un château de cartes, qui le paiera si ce
n’est les contribuables qui, en plus, pourraient subir des réductions de prestations de l’Etat et tout particulièrement les plus modestes ?
Voilà pourquoi, nous qui n’avons aucun fil à la patte, nous n’acceptons pas la feuille de route et ses incertitudes.

07.10.2014