Le simple fait que les négociations sur l’ACS sont secrètes est en soi déjà une menace pour la démocratie. Nous savons que des Etats négocient, mais avec qui et sur quoi exactement ? L’éventuelle conclusion d’un accord et le contenu exact dudit accord seront-ils rendus publics ? L’apprendrons-nous au moment de son entrée en vigueur quand de nombreux aspects de nos vies seront chamboulés du jour au lendemain ?

Nous pouvons imaginer, l’ACS étant une suite de l’AGCS, qu’il ira encore plus loin dans la déréglementation des services. On peut également imaginer que, comme cela sera le cas dans le cadre de l’Accord de partenariat transatlantique (APT), nous verrons la création de tribunaux spécialement créés pour arbitrer les litiges entre les investisseurs et les Etats, avec le pouvoir de prononcer des sanctions contre ces derniers. Tribunaux composés d’avocats d’affaires qui pourraient condamner les contribuables à de lourdes amendes. Par exemple pour des Etats qui sous pression des citoyens refuseraient d’ouvrir leurs marchés aux produits OGM.

Il peut paraître bizarre, mais cela est néanmoins nécessaire de rappeler que le service public est un service dû par l’Etat au public qui le finance. Remettre cela en cause revient à remettre en cause l’existence même de l’Etat, donc du système démocratique. Le service public n’est pas une marchandise comme n’importe quelle autre. Juste pour rappel, l’instauration d’une école publique, laïque et gratuite est sans aucun doute l’une des plus grandes avancées de l’histoire de l’humanité.

À contrario, ouvrir à la concurrence tous les services, forcer les pouvoirs publics à la « neutralité concurrentielle », traiter sur le même plan santé publique et cliniques privées, école publique et écoles privées, garantir des déductions fiscales encore plus importantes au privé et lui ouvrir l’accès au subventionnement de l’Etat, nous assistons là à une mise à mort planifiée de tous systèmes démocratiques, non pas de « l’Etat providence » comme certains l’appellent, mais simplement de l’Etat de droit. En plus, dans le cadre de la libéralisation des services, soustraire l’emploi aux règles de l’OIT pour le soumettre à celles de l’OMC, revient à planifier le dumping salarial et social.

Au contraire de ce que nous concocte l’ACS, une très forte régulation et un contrôle stricte des services fournis par le secteur public et privé est indispensable. La crise financière de 2008 en est la meilleure preuve. Après avoir joué à la roulette, les plus grands chantres du libéralisme, les banques, sont venus pleurnicher, mais menacer également pour que les contribuables viennent les sauver de leur incompétence. Seul ce contrôle est garant d’un fonctionnement des services, qui ne mette pas en péril la démocratie. Lorsque des services comme la santé, l’éducation, l’énergie, les transports, les postes et télécommunications et bien d’autres échappent au contrôle de leurs bénéficiaires, la démocratie s’affaiblit. Chez nous, en Suisse, nous pouvons déjà le voir avec toutes les structures trans-communales et trans-cantonales qui se mettent en place, STEP, groupements scolaires, etc. Ces structures sont supervisées par des personnes déléguées et non élues. Ces délégués n’ont aucune obligation de rapporter aux élus. Nous le voyons également avec les anciennes régies semis privatisés, par exemple la Poste ou Swisscom, qui bien que faisant des bénéfices continuent à licencier des eployé-e-s et à fermer des bureaux.

Nous condamnons avec la plus grande vigueur ces négociations secrètes. Il n’y a pas seulement les citoyens qui en sont exclus, mais également les syndicats, les associations d’utilisateurs et de consommateurs, et toutes les associations de contrôle. Mais s’il fallait une preuve supplémentaire du caractère profondément anti-démocratique de ces négociations, y compris les Parlements de nos Etats de droit en sont exclus.

Ce sont juste quelques-unes des raisons pour lesquelles nous appelons à une très forte mobilisation contre ces ACS. Mobilisation des peuples mais également des Parlements qui sont entrain de perdre toutes leurs prérogatives au profit des trans-nationales.

 

Gavriel Pinson

Président du Parti Suisse du Travail

PST-POP/PDA